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Humanitaire

Violences entre pêcheurs et éleveurs dans le Logone et Chari : les autorités face aux crises sécuritaire et humanitaire

16 août 2021
Temps de lecture : 5 minutes

C’est une semaine de vive tension qu’ont connues les localités du Logone Birni et de Kousseri dans le département du Logone et Chari. Ces zones ont été le théâtre depuis le 10 août jusqu’à dimanche, de violences ayant entrainé selon plusieurs sources, près de 20 morts et plus de 50 blessés. Aux dernières nouvelles, des milliers de camerounais fuyant le conflit se sont retrouvés du côté du Tchad voisin. Des femmes, des enfants et des personnes âgées pour l’essentiel,  se sont réfugiées à Oundouma dans la province du Chari Baguirmi. Entre temps, le gouverneur de la région de l’Extrême-Nord effectue depuis samedi, des descentes dans les zones concernées par le conflit qui oppose des pêcheurs Mousgoums aux éleveurs Arabes choa alors que la tension est encore vive. « C’est un conflit socioprofessionnel car les Arabes Choa sont des peuples éleveurs confrontés a des problèmes de pâturage et les Mousgoums sont des pêcheurs. C’est un problème qui se pose avec acuité et qu’on ne saurait ramener à un conflit communautaire. Nous l’avons analysé et nous sommes heureux de constater que ces problèmes ont trouvé des solutions annoncées par le ministre de l’Elevage pour que ce problème soit pris en compte par la haute hiérarchie », indique le gouverneur.

Dans la recherche d’une solution durable à ce conflit,  les chefs des communautés et autres leaders ont été mis à contribution. « Nous avons fait venir tous les chefs traditionnels de premier degré, les leaders religieux et toutes les parties prenantes qui ont pris la parole pour prôner l’apaisement et le vouloir vivre ensemble. Un communiqué conjoint a été signé par les deux parties à travers le Pr Mazra pour les Mousgoums et l’honorable Kamsouloum pour la partie Arabe Choa qui ont pris l’engagement devant Dieu et la Nation de sensibiliser les populations afin qu’on ne revienne plus sur ces actes odieux », poursuit-il.  Dans l’arrondissement du Logone Birni, le gouverneur a rencontré les chefs traditionnels de toutes les localités de l’arrondissement pour une sortie de crise. Il a à l’occasion remis de l’argent mais aussi du matériel aux familles des victimes. A chaque famille endeuillée, la somme de 500 000Fcfa et à chaque blessé, la somme de 100 000 Fcfa, au titre de « dons du chef de l’Etat », apprend-on.

Réaction tardive des autorités

Une réaction des autorités jugée tardive par certains. « Je ne crois pas que les autorités ont pris la mesure de la situation au début. Comme leur réaction n’a pas été prompte, la situation s’est envenimée alors qu’on pouvait éviter autant de victimes », confie Adam, habitant de la ville de Kousseri. Et de poursuivre, « D’ailleurs le frère Kalkaba a appelé les autorités pour la prise de mesures énergiques d’interposition entre les parties en conflit pour un retour à la sérénité afin d’éviter un embrasement mais rien n’a été fait. Les gens vont observer le calme mais la crise est profonde, il faut des mécanismes de résolution de conflits adéquats pour arrêter ces violences ». Du côté des autorités, une source explique le probleme par l’enclavement de ces localités situées en zone inondable en saison de pluies mais aussi par le manque de moyens logistiques. Aujourd’hui,  les deux communautés s’observent toujours en chien de faïence au vu de la gravité de la violence alimentée par les réseaux sociaux.

Crise humanitaire et afflux de personnes du coté tchadien

Outre une crise sécuritaire, survient aussi une crise humanitaire. Des milliers d’habitants des localités concernées par ces violences ont fui en direction du Tchad voisin. Selon le site “Tchadinfos”, plus de 1000 personnes ont été accueillies à l’école publique du village Oundouma. Ce lundi 16 août 2021, des sources diverses à Logone Birni indiquent avoir rencontré certains réfugiés qui retournent dans leurs villages faute d’avoir trouvé quoi se nourrir. Un défi pour les autorités camerounaises face à une crise encore dans l’impasse.

Dans cette zone du bassin du Lac Tchad, le problème d’accès aux ressources naturelles telles que le foncier, les cours d’eau, les pâturages, les zones minières, de pêche etc. se pose avec acuité, et crée des tensions entre les communautés. A cela s’ajoutent la croissance démographique, le conflit Boko Haram et les inondations qui ont entrainé le déplacement des populations d’éleveurs vers des zones plus sécurisées. Ces facteurs mis bout à bout accroissent la pression sur les ressources naturelles.

À propos de l’auteur

Ibrahima Adama