Depuis 2009, les pays de la région du Bassin du Lac Tchad sont confrontés à l’insurrection de Boko Haram qui a bouleversé l’ensemble de la région. Les conséquences des activités du groupe sont visibles avec les déplacements internes et transfrontaliers massifs, la destruction du tissu social et des biens, les violations des droits et les services publics perturbés. En termes statistiques, il faut noter que plus de 10 millions de personnes ont été touchées et des dizaines de milliers de morts enregistrés lors des attaques terroristes dans le BLT. Au niveau des déplacements internes et transfrontaliers, ce sont près de 2,5 millions personnes qui ont été touchées.
Ces deux journées de travail à Yaounde ont été l’occasion pour les gouverneurs des huit régions concernées par l’insurrection d’évaluer les efforts fournis dans le sens de la stabilisation de la région, dans les domaines du développement humanitaire et sécuritaire. Il s’agissait aussi de mesurer les progrès réalisés dans la mise en œuvre des interventions de stabilisation et la contribution de la société civile à la stabilisation de la région. Le niveau de participation de la société civile et la coopération civilo-militaire ont aussi été l’objet de discussions ainsi que les opportunités pour relever les défis de la coopération transfrontalière. Les participants ont apporté leurs contributions sur les différentes solutions envisageables en matière de politique à mener pour assurer la réhabilitation et la réintégration de personnes auparavant associées à Boko Haram.
Avoir plus de financement reste le défi majeur, selon le Secrétaire exécutif de la CBLT
Ayant passé en revue les progressions enregistrées avec la mise en œuvre des programmes et autres activités, Mamman Nuhu, le Secrétaire exécutif de la CBLT s’est félicité des avances enregistrées. Pour lui, ces progrès ont été possibles grâce à l’engagement des gouvernements des pays membres, des agences onusiennes, de la société civile, des médias. Mamman Nuhu sollicite plus d’engagement pour venir à bout des objectifs fixés.
« Il s’agit de se mettre ensemble afin d’identifier et d’adresser les défis auxquels font face tous les gouverneurs. Je pense qu’il n’y a jamais eu un forum où se rencontrent tous les gouverneurs. C’est donc l’objectif central de ce forum. La première rencontre, posait les bases du forum. La deuxième rencontre quant à elle, mettait en place le dynamisme et les objectifs à atteindre. A la fin de ce forum des gouverneurs, nous souhaitons une collaboration plus accentuée entre les gouverneurs. Comme vous le savez, chaque gouverneur a produit son plan d’actions territorial basé sur les neufs piliers de la commission du bassin du Lac Tchad. Le défi majeur aujourd’hui, est celui du financement contre la guerre à Boko Haram. Cependant, il y a un apport considérable sur le volet humanitaire. Particulièrement de la part de l’Union Européenne, la Grande Bretagne, l’Allemagne… » a-t-il déclaré.
Eloigner davantage Boko Haram et les groupes dissidents est le défi majeur
« Nous veillons à ce que Boko Haram s’éloigne davantage » a déclaré Midjiyawa Bakari, Gouverneur de l’Extrême-Nord qui souhaite qu’a l’issue du Forum, le gouvernement du Cameroun agisse en conséquence par rapport aux dégâts que Boko Haram a causé pendant 8 à 10 ans. Ces dégâts sont énormes et tout ou presque est à reprendre. Le Cameroun dans son plan de reconstruction de l’Extrême-Nord, prévoit d’affecter un montant de 1810 milliards de FCFA. Le gouverneur souligne que la stabilité revient petit à petit dans sa région mais le souci majeur est de veiller à ce que Boko Haram s’éloigne davantage.
Le Cameroun, à travers son premier ministre, propose aussi un financement supplémentaire pour certaines activités de la CBLT dans le cadre de l’éradication de la secte islamiste. La dotation sera d’un montant total de 1 million de dollars US, équivalent à 564 millions de FCFA. Le but est de répondre aux besoins des populations affectées, d’améliorer les conditions de vie des populations du pourtour, assurer la sécurité et mettre en œuvre des programmes économiques.
Des recommandations formulées pour favoriser davantage l’atteinte des objectifs fixés
A la fin des travaux du troisième forum, un communiqué final lu par le gouverneur de l’extrême-Nord du Cameroun a été rendu public. Plusieurs recommandations ont été formulées:
- Demeurer fermement attachés aux efforts conjoints pour stabiliser, consolider la paix et favoriser le développement durable dans tout le bassin du lac Tchad par la promotion du dialogue et de la coopération transfrontalière ;
- Demeurer fermement attaché au renforcement de la coopération transfrontalière en matière de sécurité afin de faciliter le commerce transfrontalier, améliorer la reprise économique et renforcer les moyens de subsistance des populations ;
- Jouer son rôle en tant que principal mécanisme de coopération transfrontalière dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie et travailler en étroite collaboration avec les principaux acteurs du Bassin du lac Tchad ;
- Poursuivre la réflexion commune et le partage d’informations, pour renforcer la collaboration transfrontalière et bénéficier mutuellement des bonnes pratiques existantes dans la région ;
- S’assurer de la mise en œuvre systématique et efficace des Plans d’Action Territoriaux (PAT) qui ont été lancés lors de ce troisième Forum, conformément aux plans de développement locaux et nationaux, et suivre périodiquement les progrès accomplis ;
- Travailler avec les partenaires pour redoubler d’efforts en vue d’autonomiser et donner plus d’opportunités aux femmes et aux jeunes de la région ;
- Faciliter la contribution et l’engagement des organisations de la société civile (OSC) dans la mise en œuvre et le suivi des PAT;
- Souligner la nécessité d’augmenter la capacité hydraulique du lac Tchad en vue d’améliorer les conditions de vie des populations de la région.
- Exhorter tous les partenaires à donner la priorité à la fourniture de plus de matériels militaires et autres ressources à la Force Multinationale Mixte pour lui permettre de mieux accomplir sa mission de sécurisation nécessaire à une mise en œuvre plus efficace de la Stratégie et des PAT ;
- Élargir et diversifier les partenariats dans la région du BLT afin d’obtenir les ressources nécessaires pour intensifier les interventions sans lesquelles la Stratégie et les PAT ne peuvent être mis en œuvre de manière optimale ;
- Enfin, s’engager sur un ensemble de priorités régionales communes pour la stabilisation, le redressement et le développement durable, notamment la conduite du DDRRR centré sur les communautés, le commerce transfrontalier, une plus grande opportunité socio-économique d’investissement, l’autonomisation des jeunes et des femmes, la bonne gouvernance et le rôle de la société civile pour le maintien de la paix et du développement dans la région du bassin du lac Tchad.